mardi 3 janvier 2012

La ban Pompe Moderne à la Réunion longtemps

Le plus vieux Bagnan de l'île

Pourquoi avoir choisi l'île de La Réunion pour clôturer l'aventure et disparaître à nouveau? Pourquoi pas Sète et un pin Parasol par exemple? Comme Michel Sardou?
Mon intuition était assez vague au départ. Je pensais tout d'abord à mon confrère Jacques, lui aussi exaspéré par la chanson extrapolée en industrie du disque. Il choisit de partir en bateau, pour finir aux Îles Marquises, au coeur de la Polynésie. Je trouvais l'idée séduisante, et pourquoi ne pas continuer à découvrir de nouveaux paysages, réels ou fictifs, jusqu'au dernier souffle? La métaphore de la mer, du voyage, offrait en outre une porte de sortie d'un classicisme de bon aloi. Mais une fois les pieds posés sur l'île et ce joint écrasé, je réalisais soudain que c'était seulement une fois sur place, tel le colonel Kurtz, que je comprendrai. J'allais trouver la source secrète de ma motivation au bout de mon voyage, comme le personnage de Conrad
Le premier signe se manifesta tout bonnement en prenant un rond-point. Évidemment il ne s'agissait pas de l'un de ces rond-points à déprimer une pom-pom girl qui rythment les déplacements des automobilistes des Bouches-du-Rhône. Non, sur celui-ci trônait un majestueux bagnan. Ce vieil arbre à caoutchouc, qui semblait là depuis toujours, chenille de bien des émotions pour moi par ailleurs, résonnait d'un timbre bien particulier. Un seul arbre, dont les branches retombant donnaient naissance à autant de nouvelles racines. Un symbole du cycle de la vie assez immanquable. Je n'y prêtais cependant guère plus d'attention que cela. Ce n'est que quelques jours après, au cours d'une ballade à la con, que je découvris cette statue qui me scia de stupéfaction:


Je vous avais prévenu. Cette statue à mon effigie reposait là, dans un temple tamoul de l'île.  Les méchants mal'bars (ainsi qu'on les surnomment ici affectueusement) vouaient un culte à Georges Brassens! Son plâtre, endommagé au niveau des mains, laissait même supposer la présence d'une guitare classique autrefois. Une Yamaha probablement. Les raisons obscures qui me poussaient au coeur de la forêt vierge devenaient soudain limpides. J'en eus la confirmation dès le lendemain matin, en découvrant, dans une simple tranche de thon achetée tantôt au marché de Boucan Canot, le visage de ma mère tel qu'il était conservé dans mon souvenir:


Soulagé d'avoir résolu ce mystère, je pouvais rejoindre La Pompe Moderne pour notre ultime concert, dans le cadre splendide du Théâtre Sous Les Arbres.
Point de fébrilité dans l'après-midi, les balances se déroulent comme d'habitude. Olivier m'annonce tout sourire que le concert affiche complet. Deux jours auparavant, nous avons assisté à une magnifique prestation de Daniel Waro. J'ai écrit une courte chanson en créole pour lui faire un clin d'oeil. L'émotion me gagnera évidemment au cours de la soirée. Malgré un son un peu étrange pour nous sur scène, on kiffe de jouer ces chansons encore une fois, de Cape Fear à Thriller, de Libertine à Daft Punk, matinées de Créole niveau 1, de digressions sauvages, toujours portés par le public et ses deux cents sourires. Suspens général au moment où nous nous présentons tous les quatre avec un kayamb, une percussion emblématique de l'île. Johann en lâche ses potards. Rappels avec Yéké Yéké et Antisociaux. Karl-Heinz se fendra même d'une vanne qui faillit bien me désarçonner complètement. 
Le concert a été filmé en intégralité. Nous ne disposons pas encore des images. J'espère que vous pourrez les voir sur ce blog un de ces jours. Retour à notre case sur la plage, pour une fête bien méritée où Véro de Champigny nous régalera au djembé -ce qui restera bien le truc le plus hallucinant que ces cinq ans de Pompe Moderne auront provoqué.

Georges.

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La Compagnie Créole

On kiffe La Réunion. Le concert à l'Ilôt, fief tropical du punk à St Louis se passe bien (voir précédent post). Le suivant a lieu aux Récréateurs, haut lieu des nuits de St Denis. Notre ingé son local Johann, a déjà choppé le truc. Edouard Idleson assure les lumières, quand il n'est pas en train de nous guider au coeur du cirque Mafate ("quel dommage de ne pas avoir vu Mafate" déplorera Le Pyromane pendant tout le séjour, pourtant sobre au moment de la randonnée).
Lors de ces deux premiers concerts, le public est effectivement bien présent, chante et danse, et la chaleur tropicale nous repousse dans nos derniers retranchements capillaires. Mais le meilleur reste à venir, avec la date à La Cerise, le music bar de St Paul, où l'on va établir un nouveau record d'affluence (je me base sur les chiffres, évidemment).

Le Pyromane, qui se croit en Turquie.

Ce bar serait notre repaire à l'année si on habitait là-bas.  Emilie et Julie accueille des groupes et des DJs dans la bonne ambiance qu'on aime. On se sent à la maison. Les filles imposent un dress-code moustache obligatoire et essuieront un seul refus.




La température avoisine les 80 degrés (les mêmes que chez nous) et c'est le Vietnam derrière les Ray Ban. Les Réunionnais nous portent. A un moment donné je raconte que La Pompe Moderne lé la, mani 'ec mon l'entouraz pintade, envoie le zafèr, ça y est, ça devient vraiment n'importe quoi là. La minuscule scène étant cernée par le public, cette fois-ci on ne peut s'échapper. Les rappels se succèdent et il fait maintenant 110 degrés.  




Lessivés mais heureux, on finit la soirée en petites danses chorégraphiées par le rhum arrangé. On part dans trois heures à l'ascension de la Plaine des Sables, avant le dernier concert dimanche.




Georges.

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So let me kick out the jams!



Par le site Clicanoo, de La Réunion. Notre meilleur portrait?
Georges.


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Mes Marquises


Depuis un an, je suis en contact avec Olivier Giron, un des activistes de l'île, qui contribue, avec une conviction qui ferait passer un pitbull du 93 pour un chaton en céramique, à dresser des ponts entre la vie culturelle de l'île et celle de la métropole. Après douze mois de tractations, dont je vous épargne ici les détails (j'y reviendrais dans un futur blog sur le financement des tournées intitulé Non, Toujours Rien), Olivier et le Kabardock sont prêts à nous accueillir pour une série de concerts. Et cette fois-ci ce sont les derniers. On a souvent annoncé l'ultime date de la Pompe Moderne; depuis La Maroq, jusqu'à La Cité de la Musique, mais finalement ce sera La Réunion. On a toujours joué chaque concert comme si c'était le dernier, mais c'était par inadvertance.

La case, sur la plage
Nos messages sur Skype (un moyen de communication moderne très étonnant) me le laissait pressentir, et nous ne sommes pas surpris; Olivier, épaulé par Edouard & Laure Idleson, a tout supervisé dans un gant de soie, si bien que nos allées et venues sur l'île vont du farniente aux excursions menées de main de maître. Quatre dates, un showcase, et une poignée d'interviews, notre hôte me garantit qu'il va y avoir du monde pour cette tournée d'adieux. Let them come, we're ready.


Le "Mur Sacré", lieu de prière, cher aux habitants de Saint Paul


Georges

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lundi 2 janvier 2012

Les affinités électives

L'année 2011 pour La Pompe Moderne se dessinera à travers des croisements plus intimes, comme si pour finir, son parcours se resserrait à l'essentiel.
La Belgique tout d'abord, où nous retournons par deux fois, au Inc'rock festival à Incourt (où nous devenons les parrains déviants de la finale d'Air Guitar), puis aux Francofolies de Spa, où les belges nous font un triomphe qui ferait passer une victoire en Coupe du Monde de football pour un barbecue du Parti Communiste. Salutations au précieux Oli, pour Nada Booking, notre tourneur pour la Belgique.

La Pompe et Oli /Photo: Nicolas Delbart

En mai, La Pompe reprend du service en solo, pour faire une apparition sur Canal +, où  j'ai l'honneur de chanter Le Mia à Akhenaton, puis pour le SuperMarket, le salon des créateurs des soeurs Capman
Nous jouons également à l'occasion de la rétrospective du Space Invader, à la Générale, à Paris. Fraternité discrète entre adeptes de l'anonymat et du détournement sauvage. Concert annoncé à la dernière minute, perchés sur un container de transport.




En juin le label Les Disques Bien fête la fin de quatre ans de résidence à la Java, au coeur de Belleville. Quatre ans d'un joyeux mélange de songwriters, de Tante Hortense à Théo Hakola, de Jasmine Vegas à Franck Monnet... Ce soir-là beaucoup d'artistes se succèdent sur la scène trop étroite pour des featurings en série. Nous ferons un set avec Karl-Heinz, secondés par une partie de Ricky Hollywood, et Mathieu Boogaerts en renfort pour Thriller. Ce rendez-vous mensuel de gala de haute volée va me manquer.



Le mois de juillet est marqué par mon retour au bercail, au Théâtre de la Mer de Sète, pour le festival Putain de Georges (je le prends comme un compliment...). Plus de trente ans que je n'ai pas joué dans la ville de mon enfance. On ne pouvait pas rater ça. On fait un set en duo, proche des concerts à La Cigale, avec Karl-Heinz en trompettiste volant. Je crois que le public était content de me revoir.
Entretemps, notre ultime tournée s'est mise en place pour le mois d'octobre, sur l'île de La Réunion, organisée par une joyeuse bande de lascars qui va compléter avec classe la grande galerie de frangins croisés sur la route.

Le quotidien de Sète en plein retour d'acide.

Georges.

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La Cité de la Musique

Photo Valérie Archeno/ Artwork: Serge Le Cowboy

En 2011 on célèbre en France les 30 ans de ma disparition. Evidemment je n'aurais raté ça pour rien au monde. C'est la première fois qu'un artiste peut participer de son vivant à l'hommage qui lui est rendu. Scary. Les efforts conjugués de Love8 Spectacles, Vincent Anglade (La Cité), Clémentine Deroudille et Johann Sfarr, aboutissent à une semaine de concerts à La Cité pour lancer l'exposition qui m'est consacrée dans ce temple de la musique à La Vilette, Brassens ou la liberté. La Pompe Moderne et Les Wampas constituent le plateau abusé de cette folle semaine.

Terminus en gare de La Vilette
Avec les indispensables Julien Bony aux lumières et Michel Groove au son, on sait qu'on dispose d'un écrin parfait pour pomper. Virginie Pargny (notre attachée de presse) est restée fidèle à elle-même: efficace comme un pistolet sur la tempe. La salle affiche complet, avec 1 500 personnes. Mais quelqu'un continue à nous échapper: Pas plus de Nagui à l'horizon que de Dalaï-Lama au rayon perçeuse de Leroy-Merlin.

Source: TAC photos
En lieu et place du traditionnel CD de musique d'attente pendant l'entrée du public, c'est notre ami Alek Sandre qui, dissimulé dans la salle avec un micro, chantonne, l'air de rien, des tubes a capella. Ce chauffeur de salle fantôme annonce la couleur et le public est déjà dans le good mood. On peut entrer en scène.



Karl-Heinz, Véro, et Le Pyromane entrent et entament Audrey's Dance, un des thèmes de la série Twin Peaks. Public des Wampas oblige, je rejoins mes complices et fracasse instantanément deux guitares et une flûte à bec avant d'entonner Ma Philosophie. Tout le répertoire y passe. On est bien. Un des rares concerts où l'on arrive à apprécier chaque seconde sur scène, ça ne passe pas "trop vite", les tempos sont justes, le rythme est équilibré entre chansons, appartées, medleys, slam et faux temps morts idiots. La nouveauté, de l'avis du public, est que cette fois, dans cette salle, on a un GROS SON A SA MAMAN. Je pense qu'on délivre ce soir-là un de nos meilleurs concerts, galvanisés par l'évènement, et servis par ce décalage qui n'aura jamais été aussi flagrant, entre un gros son en salle, et des tubes du dancefloor Brassens-isés.



Les Wampas feront ensuite un concert génial, comme d'habitude.
Ce fût une soirée très émouvante pour moi, après 30 ans d'absence, et cinq ans d'aventures avec La Pompe Moderne. Ce moment était un cadeau, et je serai éternellement reconnaissant envers ces amis qui m'ont accompagné avec tant d'enthousiasme. Voici le sujet d'Arte journal réalisé à l'occasion par Marie Labory. Il nous reste quelques rendez-vous en 2011. Cool.
 



Georges.

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dimanche 1 janvier 2012

La Pompe à Beaubourg

Le 27 février 2011, La Pompe Moderne fait un set au restaurant du Centre Pompidou, à l'invitation des galeries Emmanuel Perrotin et Kamel Mennour. Il s'agit du vernissage des artistes Jean-Michel Othoniel et François Morellet. La galerie Perrotin me confie qu'ils songeaient depuis longtemps à un moyen de nous inviter. Grande soirée parisienne avec tout le gratin de l'art contemporain et plus. Ma Philosophie a du mal à se frayer un chemin dans le brouhaha des petits fours. Un petit public d'initiés danse au premier rang. Peu importe, on est là, au coeur de Paris, avec nos pipes, et quel plaisir d'entendre Emmanuel Perrotin lui-même me chuchoter: "J'espère que vous allez faire Le Bal Masqué".